4.9 Droit tarifaire et procédure en cas de litiges dans la LAMal

Tarifs

Les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations concluent des contrats (conventions tarifaires) fixant les tarifs et les prix (autonomie contractuelle) 1 .

Voici les différents tarifs en vigueur en Suisse :

  • le TARMED est le tarif à la prestation du secteur ambulatoire ; en vigueur jusqu’à fin 2025 2 ;
  • SwissDRG se compose de forfaits par cas uniformes utilisés par les hôpitaux de soins aigus pour facturer les traitements qu’ils dispensent lors d’une hospitalisation 3 ;
  • TARPSY est la structure tarifaire hospitalière pour tous les domaines de prestations de psychiatrie pour les adultes, les enfants et les adolescents 4 ;
  • ST Reha, la structure tarifaire de la réadaptation hospitalière, est le tarif le plus récent, en vigueur depuis le 1er janvier 2022 5 .

Lorsque les assureurs-maladie et les fournisseurs de prestations, et plus exactement leurs associations respectives, se mettent d’accord sur une convention tarifaire, celle-ci doit être approuvée par l’autorité compétente avant d’entrer en vigueur 6 .

Si les parties ne parviennent pas à conclure une convention tarifaire, l’autorité d’approbation doit édicter un tarif de substitution 7 . Lorsqu’une convention tarifaire s’appliquant aux médecins vient à échéance, un tarif­cadre s’applique durant une année ; l’autorité peut ensuite édicter un nouveau tarif 8 . Depuis l’acceptation de l’initiative parlementaire sur le TARMED 9 , le Conseil fédéral est également légitimé à titre subsidiaire à procéder à des adaptations de la structure tarifaire si celle-ci s’avère inappropriée et que les parties ne peuvent s’entendre sur une révision 10 .

Depuis l’entrée en vigueur de cette compétence subsidiaire 11 , le Conseil fédéral en a déjà fait usage à deux reprises. En édictant l’ordonnance sur la fixation et l’adaptation de structures tarifaires dans l’assurance-maladie du 20 juin 2014 12 , il est intervenu pour la première fois dans la structure tarifaire TARMED avec effet au 1er octobre 2014, puis une deuxième fois en modifiant l’ordonnance avec effet au 1er janvier 2018.

TARDOC et forfaits ambulatoires

Le 19 juin 2024, le Conseil fédéral a annoncé que le TARMED, en vigueur depuis 2004 pour les prestations médicales ambulatoires, serait remplacé au 1er janvier 2026 par la nouvelle structure tarifaire à la prestation TARDOC et par une structure tarifaire reposant sur des forfaits. Le TARDOC a été développé par la FMH et l’association d’assureurs curafutura, tandis que la structure tarifaire pour les forfaits a été élaborée par l’organisation faîtière des hôpitaux H+ et l’association d’assureurs santésuisse.

Depuis le 1er janvier 2024, l’organisation nationale pour les tarifs ambulatoires (OTMA SA) 13  est chargée de l’élaboration, du développement, de l’adaptation et de la maintenance des structures tarifaires pour les traitements médicaux ambulatoires. Elle a été créée en 2022 pour répondre à l’obligation légale en vigueur depuis juin 2021 14  selon laquelle les partenaires tarifaires doivent mettre en place une organisation tarifaire commune pour le domaine médical ambulatoire. Les actionnaires de l’OTMA SA sont la FMH, H+, santésuisse, curafutura et la Commission des tarifs médicaux LAA, LAI et LAM (CTM).

À l’instar du TARMED, le TARDOC est un système qui détermine pour toute la Suisse les points tarifaires pour la rémunération des prestations diagnostiques et thérapeutiques. La facturation découle du nombre de points tarifaires attribués à une prestation donnée, multiplié par la valeur du point en francs. Cette dernière est déterminée au niveau cantonal par les partenaires tarifaires cantonaux et approuvée par l’autorité cantonale compétente.

Le tarif pour les forfaits ambulatoires se compose d’une structure tarifaire uniforme pour toute la Suisse et de conventions de prix à convenir séparément. Sa structure comprend un certain nombre de groupes de cas pondérés les uns par rapport aux autres. La hauteur de cette pondération est exprimée en coût relatif (cost weight) valable pour toute la Suisse. La structure tarifaire des forfaits fait l’objet d’une convention tarifaire entre les fournisseurs de prestations et les assureurs-maladie et doit être approuvée par le Conseil fédéral. Les prix de base, généralement différents au niveau cantonal ou régional, sont convenus par les partenaires tarifaires cantonaux/régionaux et approuvés par les autorités cantonales compétentes. 

Protection tarifaire, et véritables prestations supplémentaires au sens strict et récusation

Les prestations relevant de la LAMal doivent respecter les tarifs conventionnels ou les tarifs de substitution fixés par les autorités (protection tarifaire) 15 . La protection tarifaire implique l’obligation, pour les fournisseurs de prestations et les assureurs-maladie, de respecter les tarifs et les prix applicables tant les uns envers les autres qu’à l’égard des assurés16 .  La LAMal n’interdit cependant pas aux médecins de proposer d’autres prestations allant au-delà de celles de l’assurance obligatoire des soins (AOS). Ces prestations supplémentaires au sens strict peuvent faire l’objet de factures complémentaires qui ne sont toutefois pas prises en charge par l’AOS mais payées soit par les patients, soit par une assurance complémentaire soumise au droit privé qui couvre ces coûts 17 . Dans le domaine hospitalier p.ex., les prestations d’hôtellerie en division privée ou semi-privée et le libre choix du médecin font partie des véritables prestations supplémentaires 18 . Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, rien n’exclut une facture hors du champ tarifaire fixé dans le domaine ambulatoire pour autant qu’elle concerne la rémunération d’une véritable prestation supplémentaire allant au-delà de l’éventail des prestations de l’AOS. Cette prestation doit cependant constituer un « plus » et il ne suffit pas qu’elle ait simplement été fournie « à la place » d’une prestation relevant de la LAMal 19 . Les cabinets médicaux fournissent rarement de véritables prestations supplémentaires, car ils dispensent des prestations médicales ambulatoires qui figurent intégralement dans le TARMED et constituent donc des « prestations fournies en application de la présente loi » au sens de l’art. 44 al. 1 LAMal, pour lesquelles aucune rémunération supplémentaire ne peut être facturée.

Les médecins sont libres d’exercer ou non à la charge de l’AOS. S’ils ne souhaitent pas fournir des prestations conformément à la LAMal (ce que la loi appelle récusation 20 ), ils doivent l’annoncer à l’organisme désigné par le gouvernement du canton dans lequel ils exercent. Avant le traitement, ils doivent également informer les patients que les prestations ne sont pas prises en charge par leur caisse-maladie.

Litiges entre patients et caisses-maladie

Les caisses-maladie doivent rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles les assurés ne sont pas d’accord 21 , en les motivant et en indiquant les voies de droit. Les assurés peuvent former opposition contre une décision dans les trente jours auprès de la caisse-maladie qui l’a rendue 22 . L’instance suivante est le tribunal cantonal des assurances qui doit statuer de manière rapide et gratuite 23 pour les parties. Lorsque les circonstances le justifient, l’État propose une assistance judiciaire gratuite 24 . Les deux cours de droit social du Tribunal fédéral à Lucerne statuent en dernière instance 25 . Avant d’emprunter la voie juridique, les patients peuvent également s’adresser à l’Office de médiation de l’assurance-maladie (ombudsman) 26 .

Litiges entre fournisseurs de prestations et caisses-maladie, compléments tarifaires

Conformément à la LAMal, les litiges entre assureurs-maladie et fournisseurs de prestations doivent être tranchés par le tribunal arbitral cantonal 27. Dans les domaines ambulatoire et ambulatoire hospitalier, pratiquement toutes les conventions tarifaires prévoient une procédure de conciliation devant une commission paritaire de confiance (CPC) avant que le tribunal arbitral ne soit saisi, ce qui n’est pas le cas dans le domaine hospitalier.

Dans le cadre du TARMED, il existe différentes commissions paritaires selon les thèmes:

Dans toutes les lois sur les assurances sociales, les questions liées à l’interprétation des tarifs relèvent en premier lieu de la Commission paritaire d’interprétation (CPI) chargée de présenter une proposition de conciliation. La CPI traite uniquement les demandes d’interprétation qui n’entraînent pas de modification de la structure tarifaire. Toutes les personnes ou entités appliquant le TARMED peuvent déposer une demande. Bien entendu, les partenaires tarifaires – la FMH, H+, santésuisse, prio.swiss et la Commission des tarifs médicaux (CTM) – peuvent aussi saisir la CPI au sein de laquelle ils siègent de manière permanente.

Les questions relatives à la valeur intrinsèque 28  ou à la reconnaissance des unités fonctionnelles relèvent quant à elles de la Commission paritaire pour la valeur intrinsèque (PaKoDig) ; les cas concrets peuvent lui être transmis en passant par le Service tarifaire de la FMH.

Toutes les autres questions litigieuses relèvent de la compétence de la CPC cantonale (LAMal) dans la mesure où elle existe, ou à défaut, du tribunal des assurances sociales du canton concerné. La procédure est régie par le règlement cantonal de la CPC ou, respectivement, par le droit administratif cantonal. Quelques cantons ont exclu certains domaines du champ de compétence de la CPC. De plus amples informations sont disponibles à ce sujet auprès des sociétés cantonales de médecine.

Dans les domaines de SwissDRG, TARPSY et ST Reha, les partenaires de SwissDRG SA 29 sont habilités à déposer des propositions de développement des structures tarifaires hospitalières. SwissDRG SA procède au calcul des structures tarifaires sur la base des données fournies par les hôpitaux concernant les coûts et les prestations. Les structures tarifaires, leurs modifications et les ajouts sont soumis à l’approbation du Conseil fédéral.

Si un hôpital conteste le codage d’un réviseur et qu’aucun accord n’est possible, les deux parties saisissent conjointement le Secrétariat de codage de l’Office fédéral de la statistique (OFS). L’OFS se prononce dans les trente jours ouvrables à compter de la date de réception de la demande. Si le différend persiste, l’OFS peut transmettre le cas au Groupe suisse d’experts pour les classifications de santé qui se prononce en dernier ressort. Ce groupe d’experts rend sa décision au plus tard un mois après avoir été saisi de la demande 30 .

1

Art. 43 al. 4 LAMal.

2

Art. 43 al. 5 LAMal.

3

Art. 49 al. 1 LAMal.

4

www.swissdrg.org → Psychiatrie → TARPSY.  Lien.

5

www.swissdrg.org → Réhabilitation → ST Reha. Lien.

6

Art. 46 al. 4 et art. 49 al. 2 LAMal.

7

Art. 47 al. 1 LAMal.

8

Art. 48 al. 2 LAMal. Les  cantons ont l'obligation de fixer un tarif cadre lorsqu'une convention tarifaire est approuvée. Ce tarif-cadre est considéré comme un filet de sécurité et intervient lorsqu'aucun nouvel accord n'est conclu à l'expiration d'une convention tarifaire. Cf. Arrêts du Tribunal administratif fédéral C-2510/2021, C-2513/2021 du 12 juin 2024 consid. 8.3.

9

Initiative parlementaire 11.429 « Tarmed. Compétence subsidiaire du Conseil fédéral ».

10

Art. 43 al. 5bis LAMal.

11

Le 1er janvier 2013.

12

RS 832.105.5.

13

www.oaat-otma.ch. Lien.

14

Art. 47a LAMal.

15

Art. 44 al. 1 LAMal.

16

Gebhard Eugster, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum KVG, 2e édition, Zurich 2018, ch. 1 ad art. 44.

17

Arrêt du Tribunal fédéral 9C_725/2008 du 9 septembre 2009 consid. 2.2.

18

ATF 130 I 306 consid. 2.2.

19

ATF 126 III 345 consid. 3b.

20

Art. 44 al. 2 LAMal.

21

Art. 49 LPGA ; l’assureur social n’est pas tenu de rendre de décisions à l’égard des fournisseurs de prestations, qui sont sur un pied d’égalité juridique avec lui.

22

Art. 52 al. 1 LPGA.

23

Art. 61 let. a et fbis LPGA.

24

Art. 61 let. f LPGA.

25

Art. 56 ss LPGA. 

26

www.om-kv.ch. Lien.

27

Art. 89 al. 1 LAMal.

28

La valeur intrinsèque qualitative indique quelles qualifications professionnelles selon la Réglementation pour la formation postgraduée (titre de spécialiste, diplôme de formation approfondie, attestation de formation complémentaire) sont nécessaires pour pouvoir facturer une prestation déterminée aux assurances sociales. Les valeurs intrinsèques qualitatives sont indiquées pour chaque prestation dans la structure tarifaire TARMED.

29

www.swissdrg.org. Lien.

30

Règlement sur l’exécution de la révision du codage dans le cadre des SwissDRG, version 7.0 ; Office fédéral de la statistique (OFS), Cahier des charges du réviseur / de la réviseuse, version 2.0. Recommandations pour la révision du codage des séjours hospitaliers de soins somatiques aigus.


Dernière mise à jour le 22.04.2025

Zitiervorschlag: Leitfaden SAMW FMH, Rechtliche Grundlagen im medizinischen Alltag, Teilkapitel …


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